Petites réflexions autour de la quarter-life crisis, les pérégrinations professionnelles et le choix décisif de son métier.



Regardez rapidement autour de vous : combien de gens, à la sortie de leurs études, au commencement de leur carrière professionnelle, sont déjà remplis de doutes et d’interrogations ?

Au moins 1 ou 2, souvent 5 ou 6 qui se tâtent, changent de voie, se questionnent, alors même que ce cheminement a déjà été largement fait depuis nos 15 ans à grand renfort de tests et de rendez-vous chez le conseiller d’orientation.

C’est que le clivage est grand entre nos aspirations et la réalité, entre les envies de nos parents, les rêves de carrière, cette morosité ambiante mais aussi cette obligation à « être heureux » « trouver sa voie » et « faire quelque chose de sa vie ».

Photographe : http://www.malo-photos.com/
Photographe : http://www.malo-photos.com/

La petite histoire par le menu

Aussi loin que je me souvienne, autour de mes 7 ans, moi, je voulais être écrivain. C’était assez obscur, mais cela consistait à écrire toute la journée, et ça, ça ne pouvait être déplaisant selon moi.
Bizarrement après, on change de registre et c’est la passade archéologue, entre 8 et 10 ans. J’avais la chance d’avoir un grand jardin et j’ai fait des trous partout, enfin, dans le périmètre autorisé, à la recherche de trésors enfouis ou ossement humain. J’ai été accompagné dans ce périple par Copain de l’Archéologie, j’ai compris ce qu’était le Carbone 14 « Papa, maman, vous savez comment on sait quel âge a une pierre ? » « non ma chérie mais nous serions ravis que nous explique tout cela par le menu » « olala vous savez pas, je vous raconte, ça s’appelle le Carbone 14 » et je me croyais drôlement plus intelligente que la moyenne d’adultes de 39 ans environ.

J’ai découvert plus tard que tout le monde a d’ailleurs une phase archéologue, je me demande pourquoi, le fait d’être à la recherche de ses ancêtres, j’avais aussi une passion pour les arbres généalogiques d’ailleurs, je ne sais pas vous.

Vers 10, 11 ans, je me décide à devenir architecte. Bon déjà, cela commence pareil, c’est parfait, je ne suis pas tellement perdue. J’adorais dessiner ma maison de rêve et ma mère était abonnée à Marie Claire Maison, la douces fin des années 90 où tout le monde achetait encore des magazines papier, et ne traînait pas sa grole matin et soir sur Pinterest. On m’explique très rapidement que 1. il faut être doué en dessin 2. il faut être doué en mathématiques, c’est bête, je n’ai la chance de maîtriser aucun des deux.
Mais alors ma petite Justine, tu sais faire quoi ? Oui écrire mais… bingo ! Tu seras journaliste, mais attention, pas pour les raisons que vous pensez.

Du haut de mes 12 ans, j’avais déjà élaboré un véritable plan (attendez vous allez voir, c’est gratiné). L’idée était de devenir journaliste, de rencontrer du beau monde, de m’entraîner à l’écriture, de me rapprocher d’éditeurs connus, puis, nonchalamment, de leur proposer mon roman en cours d’élaboration.
C’est quand même du génie non ? En poussant la réflexion, j’aurais très bien pu me destiner à une carrière d’imprimeur mais que voulez-vous, on ne se refait pas.

Cette pensée me poursuit jusqu’à mes 22 ans.
L’idée d’être journaliste me plaisait pour toutes les plus mauvaises raisons qui soient et j’avais d’ailleurs de beaux sophismes dans ma poche lorsque l’on osait me dire qu’il n’y avait pas de travail.
Je me revois ainsi dire à ma grand-mère « mais mamie, je sais qu’il n’y a pas beaucoup de postes, mais je n’en ai besoin que d’un seul ! « , qu’est ce que tu dis de ça mamie ? Allez-y, volez moi ma phrase, cela marche pour tout, c’est tellement malin comme réponse.

Sauf que.

Je me retrouve à passer les oraux d’une école de journalisme et je me sens à des années lumières de ces aspirants journalistes en face de moi, le vide se fait peu à peu sous mes pieds et je me liquéfie devant le jury. Si vous n’avez jamais ressenti cette sensation, comme si toutes les dalles du carrelage commençaient à s’émietter, j’aurais du mal à vous le retranscrire. En bref : j’ai beaucoup pleuré pendant plusieurs jours suite à cette expérience.

J’étais en master de journalisme et je me suis posée beaucoup de questions, j’ai pas mal réfléchi sur mes envies et une idée s’est imposé : le web. Une idée que je ne regrette pas car ce monde me correspond totalement, dans sa manière changeante d’avancer, ses remises en question, ses potentialités aussi et bien évidemment, soyons pragmatique, son secteur qui se porte très bien.

 

Le quarter life crisis et l’obligation de faire quelque chose de sa vie

 
En 2015, nous sommes tous plus ou moins victimes de plusieurs obligations sociétales qui ne vont définitivement pas toujours de pair.

Celle bien évidemment de trouver un travail, un CDI c’est toujours mieux, mais qu’importe, un travail quand même, parce qu’à 25 ans, nos parents avaient déjà un boulot stable, s’étaient parfois déjà mariés ou avait mis un enfant en route et nous, nous sommes déjà en retard de plusieurs années.

On nous martèle aussi, et l’on comprend tout de suite pourquoi  c’est insidieux, que la réussite est à portée de main, et que le travail doit plus que jamais être pris côté plaisir. Des maximes du type « do more of what makes you happy » sont légion sur les réseaux sociaux.

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Et vous savez quoi ? Si cela donne envie de se bouger l’arrière-train, cela peut aussi culpabiliser certains et les faire rentrer dans une spirale malsaine « je ne ressens pas cela au quotidien dans mon travail, donc je suis nul ».

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Petite sélection par mes soins sur Pinterest de « motivationnal work quotes » parfois efficaces, parfois juste culpabilisants

Choisir son métier et exercer son activité professionnelle devient alors source d’angoisse à des niveaux extrêmement différents et avec des optiques difficilement conciliables. C’est ce qu’Anna Vital a très justement évoqué dans son infographie « Too late to start – Life Crisis », vu sous l’optique de l’entreprenariat.

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Je vous invite à cliquer pour découvrir l’infographie dynamique d’Anna Vital



Alors quoi, si l’on n’a rien fait à 25 ans, si l’on a rien construit et rien monté, pas même une application mobile que l’on revendrait à une grosse société de la Silicon Valley, sommes-nous déjà out ?

Non, bien évidemment que non, mais ce n’est pas pour autant que cela n’est pas une source de stress réelle pour bon nombre d’entre nous.

Ainsi, l’American Psychological Association, qui vient de tout juste de ressortir son étude annuelle sur les populations sujettes au stress et les causes de celui-ci,  montre une nouvelle fois que ce sont les « young adults » ( de 18 à 35 ans) qui seraient les plus stressés dans leur vie quotidienne, notamment pour des questions d’argent et avec des impacts physiques réels.
 
Personne n’est donc à l’abri d’un quarter life crisis autour de 25 ans et il est très difficile de trouver le bon équilibre entre espérances, réalité et désillusions.
C’est ainsi que certains en viennent déjà à se poser la question de la reconversion professionnelle, interrogation autrefois laissée à des personnes de 40 ans, ayant déjà eu derrière eux une longue carrière.
 
La crise des 25-30 ans, la nouvelle crise de 40 ans ?
Ce qui me chiffonne dans l’histoire, c’est qu’une reconversion, c’est un peu comme une carte joker : on n’en possède pas 6 dans sa manche. Se reconvertir à 25 ans ne nous met malheureusement pas à l’abri pour les 35 ans à venir : et si l’on sentait le besoin de se reconvertir à nouveau à 40 ans ? Est-ce tout de même possible de se construire 3 carrières pour une seule vie ?

 

Grosses espérances à la sortie des études, remise en question et désillusion dans les premières années sur le marché du travail, abandon du navire pour une reconversion ou sentiment de culpabilité de ne pas réussir comme l’on le devrait : tout ce que j’en retiens, c’est qu’il me semble qu’il est de plus en plus difficile d’être simplement heureux.
Et ça, c’est quand même foutrement dommage.

 

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