Injonction de l’orgasme, diktat de l’orgasme féminin : nous serions passé d’une société où la femme n’a pas droit au plaisir à une société où l’on obligerait les femmes à avoir du plaisir.
Il faudrait, lorsque l’on est une femme, savoir se libérer de l’injonction à jouir. Les magazines féminins, la société toute entière nous pousserait à chercher l’orgasme à tout prix et il faudrait sortir de cette normalisation.
En 2018, doit-on arrêter de chercher l’orgasme féminin ?
L’orgasme féminin, une nouvelle norme sexuelle à abattre ?
Avec Josiane, on s’est dit que l’on allait décortiquer un peu cette soi-disant injonction à jouir et cette nouvelle « norme de l’orgasme féminin » à combattre.
1. Existe-t-il une injonction à jouir pour les femmes ?
On le voit, on l’entend partout : en tant que femme, il faudrait se libérer des injonctions, se libérer des normes que la société nous impose. Comment ne pas être 100% d’accord avec ce propos ? La liberté passe la construction individuelle, au-delà des attentes de la société, quelles soient familiales, liés au travail ou encore… sexuelles.
Se libérer des injonctions sexuelles, en voilà un joli programme, tout particulièrement pour des femmes qui ont été condamnées durant des dizaines (centaines, milliers, le tournis me guette) à bien fermer leur bouche en même temps qu’elles ouvraient leurs cuisses.
Mais un nouveau paradigme a fait surface : notre société, prônant la performance et l’expérience sexuelle, aurait créé un nouveau diktat pour les femmes, celui de jouir à tout prix. Et les femmes de ressentir un nouveau complexe : celui d’être des peines à jouir.
Atlantico.fr :
« Pour cette obsession de la jouissance, elle peut même être même nuisible à sa quête. On peut néanmoins constater – et la littérature foisonne d’exemples, tel que L’amant de Lady Chaterlley -, qu’un certain nombre de femmes ressentent instinctivement qu’il existe, au-delà du « plaisir », un accomplissement sexuel beaucoup plus complet que l’orgasme incarne. »
Génial. Attendez je continue.
Francetvinfo.fr :
« Les informations sur la sexualité se sont multipliées et elles favorisent l’éducation sexuelle lorsqu’elles sont pertinentes. Elles se révèlent dangereuses lorsqu’elles ne le sont pas : elles alimentent alors une société axée sur le culte de la performance et de la jouissance à tout prix.
La solution proposée ?
Revendiquer le droit de ne pas jouir, et d’apprécier, je cite « le moment passé à deux, la sensualité » avec un joli petit nom pour qualifier cela : le slow sex.
Une vision bien binaire de la sexualité : course à l’orgasme et folie de la performance d’un côté. Moment partagé, sensualité, harmonie d’être deux de l’autre.
2. Le paradigme qui fait mal à la nénette : de toute façon, chez les femmes, l’orgasme c’est trop compliqué
Comment en est-on arrivé là ? Comment est on passé d’une libéralisation de la sexualité à un « droit de ne pas jouir » pour les femmes ?
« Mesdames, stop à la jouissance à tout prix, exigez le droit de ne PAS jouir ! »
Imaginez 5 secondes cette phrase transposé à la gent masculine, je pense que tout le monde se bidonnerait pendant 48 heures.
En fait tout par d’un paradigme très simple selon moi (et tout ce que j’ai pu lire) : les femmes auraient naturellement, intrinsèquement plus de difficultés physiologiques à atteindre l’orgasme donc vouloir l’atteindre à chaque fois (ou l’atteindre tout court) demanderait trop de difficultés et du stress supplémentaire fort dommageable.
Alors là, je vous entends au fond : bah ouai, mais bon ma pauvre Josiane, c’est vrai, les chiffres le prouvent, c’est compliqué d’avoir un orgasme et pleins de femmes n’en ont pas ! Ainsi, et selon une étude IFOP pour CAM4 de décembre 2015, sur un échantillon représentatif de 8000 femmes :
- 49% des femmes françaises ont « assez régulièrement » des difficultés pour jouir
- 8% n’ont jamais eu d’orgasme
- 1 française sur 4 (25% donc) n’a pas eu d’orgasme lors de son dernier rapport sexuel
- 1 française sur 3 simule « assez régulièrement » un orgasme
Et vous savez le pire ? Pour chacun de ces chiffres, les françaises font partie des bonnes dernières. Les françaises sont, parmi les 8 pays interrogés (Italie, Canada, Etats-Unis, Royaume-Unis, Pays-Bas…) les femmes qui ont le plus de difficultés à atteindre le climax sexuel. Ah, donc ça ne serait ni génétique, ni physiologique… ?
Ça remet un peu les idées en place.
Alors sortons du paradigme que l’orgasme féminin est compliqué à atteindre comme on nous l’a toujours enseigné : ce n’est pas parce que « les chiffres le prouvent » que c’est vrai (car je ne pense pas que nous ayons une spécificité physique française ).
Je crois que, à l’image du sexe féminin qui est resté très longtemps complètement secret (seulement quelques années que la science s’est penchée sur son anatomie grâce à Helen O’Connell) ont veut toujours nous faire croire, et ce depuis l’enfance, que le désir ainsi que l’orgasme féminin sont complexes, insondables, complètement régit par des émotions impossibles à maîtriser ou pire, que l’orgasme ne peut être atteint que lors d’un lâcher-prise impossible à prévoir donc à vouloir.
L’orgasme serait comme un peu « magique », « innatendu », « the cherry on the cake » d’une relation sexuelle, et non quelque chose qu’il faudrait souhaiter atteindre pour une relation épanouie et enrichissante.
3. Non il ne faut pas être 2 / penser qu’il faut être 2 pour jouir
Autre problème : penser l’orgasme féminin comme devant se découvrir à 2.
Alors là, mes pauvres, c’est ce que j’ai lu LE PLUS sur internet, ce que j’ai LE PLUS entendu autour de moi. Les mecs sont des manches, les mecs ne savent pas faire, c’est la faute aux relations sexuelles phallocentrées, elle n’a pas rencontré le bon partenaire pour découvrir l’orgasme….
Mais attendez… et si on arrêtait de faire retomber ça sur la faute des hommes et que l’on se prenait en main ? (oh putain, MIC DROP BITCH)
En effet, c’est tout de même assez lassant de lire encore, et je me permets une citation de Passeportsante.net, qui quand même est un magazine santé respectable :
» Bien des femmes découvrent l’orgasme avec un partenaire plus attentionné que ceux qu’elles ont connus jusqu’ici, un partenaire qui leur fait découvrir leur corps et les conduit à l’orgasme, parce qu’il pense à leur plaisir avant de penser à son propre plaisir. »
Non mais attendez là… Non mais les filles, soyons sérieuses. Comment on a obtenu tout ce que l’on a voulu obtenir ? En attendant patiemment que les choses arrivent hein !
Bon dieu non. En le prenant nous même, bien évidemment !
Cessons donc d’attendre « de trouver le bon partenaire » et focalisons-nous un peu sur nous-même, en allant chercher, en travaillant pour trouver ce plaisir.
Là, pas de méthode à donner. Trouvez donc la votre mais surtout, donnez vous les moyens.
4. Il faut désacraliser l’orgasme féminin
En continuant dans ma réflexion, un autre point semble être important à être soulevé : il faut arrêter de croire qu’il n’existe qu’un seul orgasme féminin.
Par exemple, celui que j’ai longtemps cru quand j’étais ado, car il était dépeint par l’ensemble du corps social (pornographie mainstream, films, séries TV ): long et vif, en symbiose parfaite avec le partenaire et exclusivement via une pénétration (le plus souvent en missionnaire) sans autre stimulation.
Il n’y a pas de bon ou de mauvais plaisir, comme il n’y a pas de bonne ou de mauvaise pratique sexuelle (if everyone in the room is consent of course).
Il n’y a donc pas d’orgasme d’adulte, contrairement aux enseignements de la psychanalyse Freudienne qui, même s’ils sont depuis longtemps jetés à la poubelle, continuent de gangrener tous nos schémas de pensée (je vous invite à lire ceci pour nourrir votre réflexion)
L’orgasme exclusivement vaginal (si tant est qu’il existe) qui serait le seul véritable (= pénétration avec un oubli total du clitoris), a donc probablement été créé pour nier le plaisir féminin et soumettre les femmes : un petit retour historique sur l’orgasme et le clitoris permet de mieux le saisir.
Il est donc tout à fait naturel, même avec un partenaire d’un soir ou celui d’une vie, de dire, de faire ce qui amène naturellement au plaisir lorsque l’on y arrive déjà seule.
« Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ai l’ivresse »
Cet orgasme sacré, qu’on se le dise n’existe pas.
L’orgasme féminin est multiple, différent pour chacune mais indubitablement lié au clitoris, qui, JELERAPPELLEENCOREUNEFOISAVECJOSIANE, est le seul organe dédié au plaisir.
En gros : si vous avez besoin d’être pendue par les pieds et que votre partenaire chante Les Sardines de Patrick Sébastien en vous caressant pour vous faire jouir, GO FOR IT.
5. Il faut s’exiger l’orgasme… sans en faire un chemin de croix
Comme il faudrait exiger que notre conjoint se lave les pieds, alors exigeons de gouter à l’orgasme.
Arrêtons de dire que la société nous oblige à l’atteindre et qu’en bonne fille un brin féministe, on ne va pas céder aux diktats.
Se réapproprier le plaisir féminin, avec bienveillance, ne devrait pas être vu comme une performance ridicule, mais comme une récompense que l’on devrait tous s’offrir.
Une forme d’empowerment au féminin, montrant qu’encore une fois, les femmes en ont dans la culotte.
Littéralement.
Sources et Webographie sur le sujet
Pour continuer la réflexion et lire un peu, quelques articles que j’ai trouvé intéressant sur l’orgasme féminin, sans oublier l’ensemble des liens présents directement dans l’article :
http://www.unige.ch/presse/campus/pdf/c81/dossier.pdf
https://www-cairn-info.com/revue-nouvelles-questions-feministes-2010-3-page-102.htm
https://www.francetvinfo.fr/sante/sexo/l-orgasme-une-obligation_1978591.html
http://www.madmoizelle.com/jamais-avoir-orgasme-762341
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There are 2 comments
A lire absolument la « bd »: L origine du monde » de Liv Strömquist
Merci pour le titre, je note pour la lire rapidement !