[La suite de mon carnet de voyage à Chicago. Pour la première partie, c’est ici.
Aujourd’hui, les premières impressions à notre arrivée.]
Lorsque nous posons notre pied sur le véritable sol, et non plus sur la moquette blanchie de l’A340, le changement n’est pas tout de suite perceptible. Alors certes, la langue est différente mais la file d’arrivants se presse de la même façon que dans tout aéroport européen. J’observe ceux qui sont descendus de l’avion en même temps que nous et je suis surprise : deux d’entre eux portent de gros sabots de bois, deux grands et gros jeunes hommes qui n’ont pourtant aucune difficulté pour marcher. Aurions-nous vu ça en France ? Je commence à sentir une brise américaine au milieu de cet air climatisé.
Le couloir est long, interminable et nous voici enfin devant la douane, celle qui vous pose des questions idiotes et vous délivre votre laisser-passer. L’homme a voulu savoir ce que je faisais comme études ; communication, et un anglais mauvais comme un malabar trop mâché, il y avait de quoi sourire et ressentir une forte gêne. Mon compagnon s’en sortais bien mieux que moi : je n’étais pas du tout étonnée.
Les bagages en main, sa famille, du moins sa tante et le mari de sa cousine, nous attendait. Premier choc culturel ; la petite dame me prend dans ses bras, à la manière des séries américaines pour filles. Combien de fois avais-je commenté ce geste par un dédaigneux « Complètement fou ces américains, ils ne se connaissent pas et se tripotent déjà », d’où ma déduction de l’aspect lubrique de ce peuple, chose que je n’ai pas eu l’occasion –heureusement, malheureusement ?- de vérifier.
Sur le parking, la collision psychique se fait plus forte ; autour de nous, les voitures sont énormes, comme sous anabolisants. Ce n’est pas vraiment une découverte, mais le voir me permet de le croire plus durement. Pas une voiture de pauvre ou de cadre moyen, à l’image des françaises ; seulement des mastodontes. C’est d’ailleurs dans l’une d’elle que nous montons, un 4X4 Lexus assez haut pour que vous soyez obligé de poser votre pied sur une marche en vous agrippant au cuir clair. Un peu sonnés par la fatigue, nous nous laissons porter ; il est environ midi à Chicago, et donc 19h en France et nous sommes levés depuis 5h ce matin. Les routes sont larges, le balancement m’endort comme un enfant, mais j’essaie de rester bien éveillée pour profiter de ces premières visions.
On comprend tout de suite comment ces corps d’obèses ont pu se démultiplier à l’échelle d’une nation ; une simple manière de ressembler à son environnement. Les routes sont larges, les panneaux publicitaires agressifs, les volumes architecturaux ne connaissent pas de limites. Tout est délicieusement différent, avec une sensation incroyable de rationalité dans la construction : ce sentiment sera présent tout au long du séjour, avec ces quartiers bien construits, comme élevés par la main de Dieu, loin du fouillis intellectuel de la France.
La ville, depuis mon demi-sommeil, me parait incroyable, dépassant presque mes premières pensées, mes premiers rêves aussi. Comme si l’être humain, malgré les nouvelles technologies de la communication qui nous enfoncent dans le virtuel, n’appréhendait vraiment son monde que lorsque ses pieds, son torse et son nez gisaient vraiment dedans. Alors donc, je gisais.
Et ce fut un peu ce qu’il se passa pendant une quinzaine de jours. Je m’abreuvais de toutes ces nouvelles images, sans savoir comment m’arrêter. Sans le vouloir, finalement. J’ai d’ailleurs essayé de tout comprendre et je dois malheureusement avouer que je ne réussis pas. De quoi annoncer d’autres périples, plus tard. Et développer un sens encore vierge et neuf : l’aventure.
[A suivre]
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